Ce n'est pas réellement un choix. J'ai peu de temps pour écrire. Je " boucle " en règle générale une nouvelle - je parle du premier jet - en un ou deux week-ends. La plupart de mes contes s'installent dans ce rythme, disons entre 35.000 et 80.000 signes. L'abondance plus ou moins grande des épisodes, des personnages n'est pas liée directement à la forme, mais au thème et à la volonté de composer mes textes comme je le ferai de mes musiques, avec des reprises, des modulations, des jeux de symétrie. Pour avoir beaucoup écrit sur Poe, je tiens en haute estime sa théorie de la nouvelle. Mais je crois que les temps ont changé, que les récits tendent à se morceler bien plus qu'au XIXe siècle - où Hoffmann déjà aimait à jouer sur l'éclatement. On est passé d'une construction purement logique, voire chronologique, à tout un système de résonances, d'harmonies en écho. Les deux nouvelles que vous citez sont fondées sur les doubles, et pour la seconde sur les univers parallèles. J'ai besoin de personnages qui se répondent, ou encore qui contrastent violemment les uns avec les autres (comme dans un contrepoint). Dans le premier des deux textes par exemple, le même rêve, mais évoqué de deux points de vue différents, sert d'ouverture et (presque) de fermeture au récit. Au milieu, pour faire mieux sentir cette composition, j'avais besoin d'une sorte de négatif de ce rêve. Il me fallait donc un autre personnage autour duquel organiser cet épisode. Ce personnage, Sibylle, devait en outre être annoncé par un autre, Coralie, parce que la femme du rêve, Iseult apparaissait tout d'abord sous la forme d'une poupée, Vassilissa.

Présenté ainsi, tout cela peut paraître bien artificiel. Mais je ne construis rien au départ. J'ai généralement en tête la scène initiale et la scène finale quand je commence à écrire. Le reste s'organise au fur et à mesure, sans que j'en sois pleinement conscient. C'est quand je me relis que je découvre vraiment ce que j'ai pu faire.

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LES TAMBOURS DU VENT