Le zapping n'exclut en rien l'engagement complet. Je disais à l'instant que je n'écris jamais en écoutant de la musique. Il faut se laisser emporter - corps et âme - par ce qu'on crée et cela conduit à sacrifier bien des choses et à ne jamais céder à la jouissance béate. Le contentement - et surtout le contentement de soi ! - tue le désir et avec lui l'œuvre. C'est quelque chose d'exaltant et de terrifiant à la fois que d'être pris dans ce mouvement, parce qu'il vous pousse sans cesse en avant, sans jamais d'espoir de repos. J'ai dit tout à l'heure que je me " reposais " d'une forme de création sur une autre. Mais c'est dans ce cas un repos singulier, qui me fait avancer un projet pendant que l'autre sommeille quelques heures, au pire quelques jours. Bref, il y a toujours devant moi un objet à atteindre et, dans mon esprit, le doute de pouvoir y parvenir. Il faut désirer l'œuvre pour avoir la moindre chance de la voir advenir. Ce que dit Irina à Florestan c'est que la musique se nourrit de la même dynamique que l'amour. Il faut toujours avancer, oser, progresser. Imaginez un funambule qui s'arrête. Que se passe-t-il alors ? Il tombe. L'élan est pour moitié dans l'équilibre. L'amour, la musique, la littérature ont tous trois besoin de cet élan, s'ils veulent se maintenir.

Évidemment, tout cela ne va pas sans risque. Le funambule peut tomber, même en avançant, et comme il ne regarde pas le vide sous ses pieds, la chute peut être terrible. C'est aussi ce que dit Irina. Il n'y a jamais de confort dans la création. Il faut jouer sa vie, sa vie tout entière, à chaque pas en avant.

Retour

LES TAMBOURS DU VENT