« Ta cousine
se débrouille fort bien ! continua Hunter. Pourquoi
tiens-tu tellement à la maintenir à distance ?
— Cette
lourdaude ne nous apporterait que des ennuis »,
répondit enfin
la jeune femme, d’une voix distraite.
Les sourcils
froncés, elle peinait à retenir ses yeux qui, tels des
aimants, s’entêtaient à retourner à la surface.
« Quel genre
d’ennuis ? insista Hunter. Explique-toi !
— Un, elle ne
supporterait pas que j’aie repris les recherches
de notre grand-mère Destiny sur le 11 septembre.
Deux, vous la décevriez beaucoup de violer la confidentialité
en me laissant lire les mémoires qui m’intéressent. Et trois, elle
s’offusquerait grandement d’avoir travaillé
d’arrache-pied pour obtenir l’évulsion de Destiny à laquelle
j’accéderai moi-même librement le moment venu. Sans compter
que je ne tiens pas à ébruiter ma présence parmi vous ! »
La réplique,
débitée d’un trait dans l’espoir d’enrayer la discussion, ne
désarçonna pas Seymour. Depuis l’arrivée décriée de
l’historienne dans le groupe, il s’était en effet habitué à sa
volubilité mordante et enflammée et il ne regrettait plus que Liam
Granger, leader de l’organisation, lui ait imposé la
présence de cette fougueuse jeune femme de vingt-six ans. Intègre,
travailleuse et volontaire, Katherine l’impressionnaitpar son
acharnement désespéré à mettre au jour les vérités
dissimulées sous la bienséance historique, vérités dont personne, à
son sens, ne se préoccupait plus. Et s’il aimait tant à pousser
la jeune femme dans ses derniers retranchements c’était parce
que son éblouissante chevelure d’ébène ruisselait
alors sur la peau diaphane de son décolleté, dans un désordre
caressant qui le chatouillait jusqu’au frisson.
« Sauf que ta
cousine et toi ne vous intéressez pas du tout aux mêmes
contenus, rétorqua-t-il posément. Clarence nous a d’ores
et déjà précisé d’éviter tout ce qui concerne les événements
du 11 septembre. Elle ne veut récupérer de votre
grand-mère que les moments de bonheur partagés avec sa propre
mère, prénommée Grace, je crois ?
— Pff, quelle
nigaude ! siffla l’historienne en enroulant ses cheveux
contre sa nuque. Si elle s’imagine soigner la dépression de
ma tante avec un pauvre livret de papouilles et de gazouillis…
Elle ferait mieux de l’emmener au chevet de Destiny tant
qu’il est encore temps. Affronter enfin la réalité : voilà ce dont
Grace a besoin ! »